vendredi 16 janvier 2009

L'Usine du Passé

C'est fou comme les petites choses banales de la vie sont parfois porteuses de grands messages.
Dans les petits pots les meilleurs onguents, dit-on.

***

Dernièrement, je me suis tapé une petite visite dans un magasin d'électronique très connu que je ne nommerai pas. Appelons-le simplement "L'Usine du passé" :O)

Eh bien... ceux qui ont déjà lu mes premiers petits délires écrits se souviendront peut-être du trop de service que j'obtient généralement à L'Usine du passé... Habituellement, dans ce genre de place, sitôt entré, un vendeur me colle aux semelles en essayant désespérément de me vendre "le truc qu'il vous faut absolument, ma p'tite dame".

Oui monsieur. A L'Usine du passé, on vend, ça c'est sûr.

Et bien je me pointe à L'Usine, voyez-vous, pour ce que je croyais être une bagatelle: mon fil d'ordinateur portable (acheté à L'Usine même) a brisé, usure normale et vilaines dents de chiot aidant, et donc j'y vais, pensant être bombardée de regards par des vendeurs avides de faire tchik-é-tchik à ma précieuse carte de crédit. Je vais là d'habitude sans trop savoir ce que je veux, et j'en ressors toujours un peu plus vite que prévu, avec l'impression de ne pas avoir nécessairement bien pesé la lourde décision d'acheter... Sachant ce que je cherche, ça va être rapido-presto, c'est sûr! que je me dis. En plus, je mets les chances de mon côté, et j'y vais un jour de semaine, peu de temps après les fêtes, les gens sont à sec et les stationnements tout pleins d'espaces libres... Ma foi, je suis presque certaine de surprendre des dizaines de braves vendeurs m'attendant dans le portique... Que sais-je? Peut-être que je vais gagner quelque chose, aussi?

"Félicitations Madame! Vous êtes la seule cliente à avoir franchi la porte d'entrée en ce vendredi 9 janvier, et c'est la raison pour laquelle vous vous méritez trois ensembles laveuse-sécheuse pour le prix d'un seul! "

Maaaaaaaaaaaaiiiiissss non voyons.

J'arrive.
Je me stationne.
Plein d'espaces libres. Jusqu'ici, tout va comme prévu. Vive l'Usine du passé.

J'entre.
On entendrait une mouche voler...
Il y a effectivement peu de clients... mais encore moins de vendeurs!
Bien sûr, où avais-je la tête?... Ils doivent se remettre du boxing day...

Je m'avance dans une allée. Ça se gâte dangereusement.
Il n'y a qu'un seul vendeur. Il répond aux questions d'une dame qui hésite visiblement entre deux moniteurs d'ordinateur... ET IL M'ÉVITE CLAIREMENT DU REGARD!! Celui-là même qui autrefois se garrochait sur mon passage pour me vendre la meilleure cochonnerie possible, il m'évite!

S'ensuit une poursuite passionnée dans les nombreuses allées de Patente-à-gosse-dépôt: je le suis partout, j'essaie d'attirer son regard, je gesticule un peu, mais pas trop quand même, je me risque à dire un petit "Monsieur?" interrogatif de temps à autre, et je tâche de taire du mieux que je peux la petite voix intérieure qui menace d'aller directement vociférer dans le micro du magasin que le service est pourri. Rien à faire: monsieur le vendeur se promène de la cliente à l'ordinateur du "service à la clientèle", de l'ordinateur à l'allée des caméras numériques, puis d'une allée à une autre, avec un front plissé et un air tout sérieux.
On se croirait dans une mission importante du FBI.

J'ai dû me rendre au timide tapotement de l'épaule pour forcer son attention.
Quand même.

"Avez-vous des fils d'ordi de remplacement pour mon portable?
- Bof..."

Désintérêt complet de sa part.

" Ben... tout c'que j'ai, c'est un fil universel avec plusieurs adaptateurs au bout. Y'est quatre-vingt-dix dollars.
- Ok...
- ...
- Là, c'est-tu vraiment universel, c't'affaire-là? Est-ce que j'ai des chances d'arriver chez-nous pis de pas pouvoir l'utiliser avec mon ordi?
- Bof, ça s'peut."

Et le charmant employé, probablement sur un lendemain de veille, s'en est allé avant même que j'aie pu chiâler sur quoi que ce soit.


Bon, finalement, n'ayant pas réellement d'autre choix valable, j'ai acheté la dite patente qui m'était à cet instant-là plutôt indispensable, travail oblige. J'ai payé, je suis partie, mon fil fonctionne, est compatible avec mon portable, et est déductible d'impôt, alors loin de moi l'idée de m'éterniser dans mes plaintes à propos de la technologie... mais tout de même, ma petite épopée confirme quelque chose.

(...)

(roulement de tambour)

Les choses ne se passent jamais comme on pense qu'elles se passeront.