dimanche 15 juillet 2007

Pet Shop

Ça fait déjà presque longtemps...
Presque déjà deux mois et des poussières...

* * *

Un matin d'avril, je me lève, le coeur au bord des lèvres, comme à tous les matins depuis quelques temps...

Un pipi et quelques minutes plus tard, me voilà les yeux bien écarquillés devant mon petit bâton de plastique clearblue qui affiche un beau "+" bien évident comme sur le mode d'emploi...

?!...!! Ça y est!! Déjà??; Enfin!! : Je suis enceinte!!!

Dans ma tête, les déjà et les enfin s'entremêlent avec tous les signes de ponctuation existants, et je me demande bien de quoi je peux avoir l'air tandis que je reviens dans le lit en guettant d'avance la réaction qu'aura mon chéri quand je lui dirai enfin/déjà que c'est enfin/déjà positif.

(...)

Il n'a pas dit grand chose, mais vous savez, une face vaut bien des signes de ponctuation réunis.

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C'est fou ce que ça pense vite, un cerveau... Alors que parfois c'est si paresseux et lambineux, tout à coup ça se met à penser à tout en même temps: les noms, les maisons de naissance, la pièce de la maison à transformer en chambre d'enfant, les sièges d'auto, les parents qui vont devenir grand-parents, les listes de téléphones à faire, de choses à lire, à apprendre... En deux temps trois mouvements mon navigateur internet est rempli de nouveaux liens dans mes favoris, une épicerie santé est faite, un livre sur le développement de bébé est acheté, et je sais déjà qu'il y a là-dedans un petit coeur...

* * *

Compenser: contrebalancer, équilibrer, racheter, indemniser.

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Bon, je ne vous ferai pas le coup, je ne vous ferai pas croire ni pendant des jours ni pendant des semaines qu'il y a un petit être caché derrière mon nombril. Quelques temps plus tard, après un gros mal de ventre inquiétant et trop d'heures passées à l'urgence, après des examens, des prises de sang, des espoirs, des inquiétudes et après avoir développé un genre de simili-trouble-obsessionnel-compulsif me poussant à aller aux toilettes toutes les demi-heures pour estimer mes pertes de sang, le verdict est tombé de la bouche de l'échographe, à peu près aussi froid que le gel qu'on vous met sur le ventre pour tenter d'y voir quelque chose à l'échographie.

"Y'a aucun signe de grossesse, tout est évacué. Au moins t'auras pas besoin de curetage."

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Compenser ( suite ) : Compenser une perte par un gain, un ennui par une satisfaction.

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Bête, comme histoire, hein? Banal, même, si on considère qu'une grossesse sur 4 se termine par une fausse couche... Plutôt platte, je dirais. Tous ces espoirs qui tombent à l'eau, que voulez-vous, ça ne fait pas une histoire drôle, c'est moche, c'est dur à traverser peu importe les "y'en aura d'autres" qu'on peut nous dire pour nous réconforter, mais c'est ça qui est ça, en tout cas c'est ça qu'aura été mon printemps 2007. De l'inquiétude, des bleus de prises de sang sur les bras, des poches sous les yeux, un temps de merde et un poster de winnie l'ourson qui traînera pendant un bon bout de temps dans l'amertume de mon garde-robe.

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Compensation: Avantage qui compense un désavantage. Dédommagement, réparation.

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J'ai été plusieurs semaines à haïr intensément les femmes enceintes, de mêmes que tous les êtres humains osant se promener avec une poussette devant moi. Ça, c'est tout un tabou à défaire, quand même. Haïr une femme enceinte, ça ne se fait pas vraiment, surtout quand on l'haït spécifiquement parce qu'elle a une belle bedaine et qu'elle semble heureuse et épanouie... Ça ne se fait pas, et pourtant, en en parlant autour de soi, c'est fou comme on se rend compte que c'est répandu.

"Bon, une telle est encore enceinte, la vache..."

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Compensatoire: qui compense. (ah bon.)

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Bon, tsé, finalement, la vie reprend son cours, le travail, les questionnements, les émissions de télé insignifiantes, les poussettes sur la rue, les vacances qui approchent, les vélos qui sortent, les bedaines en chandails moulants, enfin rouler en voiture les fenêtres baissées, la routine, le travail, planifier un petit voyage pour l'été qui s'en vient, les bébés en poussette qui font des risettes.

La vie reprend son cours, mais pas tant que ça. Juste un peu à la fois.

* * *

Finalement, on se paie des trucs. On le mérite bien, l'année a été dure après tout... Des vacances, des restos, des soirées au cinéma... Une folie par ci, un extra par là, et puis tant pis, gardez la monnaie... je le mérite bien, comme dans la pub de l'Oréal.

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Deux petits yeux doux, tellement doux... et intelligents aussi! De petites dents toutes blanches, deux belles longues oreilles, une belle langue rose, de grosses papattes fortes et poilues, une petite bête charmante comme on en voit rarement...
Le chiot le plus mignon, le plus calme et le plus docile que j'aie jamais vu. J'ai craqué pour un cocker, en plein pet shop durant mes vacances ;O)

Il me reste à amadouer le propriétaire. Un regard de piteux-pitou devrait suffire.

En attendant, je flatte, je nourris, je promène, je ramasse le caca, je répète mille et une fois assis, couché, reste, je me fais arrêter à tous les coins de rue par les passants qui n'en reviennent pas de voir mon beau petit pitou. Et pendant ce temps-là, c'est drôle, les bedaines des plus-chanceuses-que-moi me dérangent un peu moins, occupée que je suis à catiner ma bibitte bien poilue.

* * *

Compensation: acheter un chien après une fausse couche.

* * *

Ben quoi? On n'a qu'une vie à vivre...



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